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La Passion ou la force de l'éloquence
bord droit
Artistes :
Olivier HOUETTE
Orgue

Frédéric Martin
Violon
Résumé :
Quelle plus forte impression est-il nécessaire de produire pour toucher les âmes ? Quel est le verbe suffisamment puissant et élevé pour conduire au plus haut l'esprit de celui qui pense et s'interroge ? Quel plus puissant vecteur que le souffle immense du plus grand et du plus noble des instruments, l'orgue joint à la voix presque humaine de l'instrument entendu comme le plus expressif de tous, le violon ?
Description :
Placé à mi hauteur de la nef, le carrefour des musiciens comme on appelait la tribune d'orgue au XVIIe siècle, la musique instrumentale est une rhétorique sans parole qui, symboliquement, se situant au dessus de l'humain, parle au cœur même.

L'orgue tient dans la polyphonie toute la science de la composition, le violon, lui, parle d'affect et exprime les passions. C'est tout l'art d'un siècle qui s'est fait l'héritier de l'éloquence, au delà de l'humanisme de la  Renaissance qui travailla à en retrouver la technique chez les "anciens".

Passion des sentiments qui transcendent les émotions, c'est tout un vocabulaire qui est mis en oeuvre pour convaincre. De l'imitation des trois coups dans le Prélude, répétés comme un écho, qui nous rappellent ces clous qui nous crucifient depuis 2000 ans au tremblement de terre qui déchire le voile des cieux, en passant par les pleurs de la Vierge Marie qui crient son désespoir au monde insensible qui par des variations sur sa plainte, se moque du crucifié, joue aux dés sa tunique, se disputent… La Crucifixion de Biber issue des Mystères de la Vierge est un modèle de la rhétorique de cette époque. Tout comme les variations multiples sur les pleurs (Pavane lachrimæ, de John Dowland) que reprend Johan Schop décrivent sous une cette forme apparemment contrainte les tourments de notre coeur, le discours est en fait le même dans la 12e Sonate de Jean-Ferry Rebel qui utilise une danse, un menuet, pour chanter sa mélancolie au gré de couplets commentant par des affects différents l'exposé du refrain dans cette forme rondeau que les français du Grand Siècle appréciaient tant.

Douleur et violence encore dans l'Invention de Bonporti qui débute son discours par un récit, Lamentevole, quasi vocal où s'entendent presque les paroles de reproche de cette voix intérieure qui vous demande si vous aviez raison, qui vous laisse dans le doute. Suspensions, rupture, oppositions des figures, le cœur s'emballe, se perd puis retrouve un chemin plus certain, une assurance plus heureuse et plus sereine. C'est le langage de la rhétorique qui est au centre du discours musical de
cette époque. Parésies, syncopes, hétérolepsis, anabase et catabase comme dans cette longue passacaille de la quatrième sonate de Schmelzer dont le mouvement descendant inspire la génuflexion, le recueillement. Aux extrêmes du stylus fantasticus d'un Schop se trouve le classicisme de Corelli qui impose son sens de la mesure par la symétrie et l'équilibre soigné de ses compositions. Un mouvement, une figure. Il est le chantre de la rationalité élégante...